Tuesday, March 18, 2014

back au pays basque! (chapitre troisième)


"Arriben les grues, és hora d'emprendre el vol!"
a déclaré Wallis en se brossant les dents.


Après sept semaines de bons et loyaux services dans le froid, le vent et la pluie, le dieu basque du climat a voulu nous faire un petit cadeau pour notre départ en pré-retraite: le soleil a fait son apparition pour nos dix derniers jours ici, on a pris quinze degrés en trois jours et les paysans sont sortis tout à la fois de leur hibernation morose et... de leurs gonds!


"O gué, o gué, le pays basque est déchaîné,
O gué, o gué, les beaux jours sont arrivés!"


Bon, on ne voudrait pas avoir l'air de se plaindre non plus : c'est quand même bien agréable de faire la tournée en manches courtes, de casser la croûte au soleil en plissant les yeux et d'arriver pour trouver, ici et là, les brebis dehors parce que "je pensais que vous arriveriez plus tard" ou "plus tôt", ou encore "On m'avait dit demain", voire "Ashtapitoi! J'avais complètement oublié".  Bref. C'est vrai, c'est arrivé d'un coup. Un dimanche gris mais pas trop froid, mais gris quand même, mais supportable, on était montés au parc derrière la citadelle tendre la slackline entre deux gros arbres et essayer de dégourdir un peu nos corps, euh bin, engourdis par l'hiver quand soudain on a entendu quelque chose comme ça:

(merci à Martin Miethke pour cet extrait (XC71065, voir la page) - licence Creative Commons)

En levant les nez, on a vu une formation en triangle loin, très loin là-haut ; bientôt suivie d'une autre et d'une autre encore. Les grues (grus grus) étaient de retour d'Afrique, annonçant à qui voulait l'entendre la fin de l'hiver. Leur passage est un spectacle magique: immenses V mouvants qui glissent sur le ciel, se forment, se déforment et se reforment, se branchent, se débranchent et se rebranchent dans un mouvement continu. Pardon pour le cliché, on dirait un ballet. Tout y est gracieux et aérien: les tutus et les collants rose pastel, les ballerines à pointes en bois, les petits rats... Mais surtout, ça fait un boucan infernal et si ce n'est pas exactement harmonieux, c'est en tout cas très doux à l'oreille pour le baume printanier que ça met au cœur. Enfin, on se comprend... Ce qui en revanche fait un peu plus mal, c'est la gueule de bois du lendemain. Le retour à la réalité terre à terre. On se réveille avec encore le goût du vol des grues sur le ciel, on petit-déjeune, on s'habille, on se brosse les dents, on sort à l'air libre et on se prend la fin de la trêve hivernale en pleine poire. Il y a du smog qui pique les yeux, on ne voit ni les montagnes, ni le soleil. À des kilomètres à la ronde, ça sent le barbecue, le feu de bois et - excusez mon langage - la merde. Explication: l'hiver à défaut d'être froid, fut humide. Pas de gelées, mais de l'eau, rien que de l'eau, de l'eau de pluie, de l'eau de là-haut (sic). Or, d'un côté, il y a la tradition de l'écobuage (dont on a déjà parlé) qui se pratique en février-mars. Les jours ensoleillés mais sans vent, on crame allègrement la broussaille, la fougère et le thuya, toutes les parcelles non pacagées et non entretenues.Ça nettoie bien, seule la petite végétation sèche et morte brûle, ainsi que quelques poteaux de téléphone et un randonneur de temps en temps, mais les arbres et arbustes sains résistent, eux. Enfin, il y a des accidents régulièrement mais c'est important pour l'écologie prairiale (allez dire ça aux lombrics et aux campagnols!) et ça fertilise… Bon, glissons.


l'écobuage, une tradition pastorale...
Avec cet hiver pourri et ces deux mois de pluie continue (quand il s'arrêtait de pleuvoir, il ventait à décorner les bœufs, les boucs et j'en passe - Brassens n'aurait pas laissé passer si belle occasion de moquer un cocu), l'envie d'écobuer était là et bien là. En Iparralde, chacun rongeait son frein et astiquait son amadou. D'autre part, pour les mêmes raisons de météo peu clémente, tempérée mais humide, les bêtes - avec ou sans cornes - restaient en leurs pénates. Impossible de les sortir des bergeries et étables sous et autour desquelles la litière sale et crottée s'accumulait dangereusement. Qui dit impossible de sortir les bêtes, dit impossible de rentrer le tracteur pour racler et sortir la mer... Les fosses étant prêtes à déborder, l'urgence se faisait sentir. Au lendemain du premier jour de soleil, vlan!
et la lumière fut (de retour)...
Les prés à peine secs (ou pas tout à fait encore, voir photo ci-contre), vas-y que je t'envoie les bêtes faire un tour dehors et prendre l'air. Vas-y que les tracteurs et leurs pompes à mer... se mettent à l'oeuvre. Et vas-y que je t’épand tout ça dans les champs pour fertiliser un bon coup. CQFD: fumée épaisse façon banlieue industrielle de Beijing, odeur de feu de bois, de barbecue et de mer... Comme aurait dit mon arrière-grand-père dans ce roman rural pseudo-autobiographique que je n'ai jamais écrit: "écobuage et épandage sont les mamelles du printemps". On a remis ci-dessus deux nouvelles photos pour illustrer le thème écobuage (d'autres ici) mais on ne s'appesantira pas sur l'épandage: ça n'est pas très visuel. Faut s'approcher, Coco. Faut l'sentir, faut l'vivre, quoi, s'tu veux... Voilà.

En résumé et pour finir en beauté: on a profité du (prin)temps, on a savouré les dernières journées de travail, on a pris des photos des prés verts et des bêtes heureuses de retrouver le soleil, puis un beau jour (un vendredi) on a dit au revoir à tout le monde à la clinique et on a chargé la voiture. Fin de l'épisode Iparralde (pour cette année, du moins). On part pour de nouvelles aventures, pleins d'envie et d'énergie. Prochaine étape l'Ariège pour du wwoofing et du helpxing, un stage de tonte de brebis et d'autres aventures qui commencent à prendre forme... Ne perdez pas le fil, restez connectés!

No comments :

Post a Comment