Friday, March 21, 2014

Au fil de la Nive: épilogue à balancer?

(gorac, gorac, gorac...)

Ça y est, j'ai fait mon jeu de mot de la semaine. C'est bon, je peux cocher ça dans la liste. À la fois, il était temps, on est déjà samedi! Mais ne comptez pas vous en tirer à si bon compte. Il nous reste toujours - ou il nous manque encore - la piqûre de rappel dont je parlais déjà à notre arrivée à SJPP il y a deux mois. Et la case à besoin de sa croix comme la moule de son rocher. Bien, passons... Revenir en basse Navarre et y passer deux mois immergé dans la réalité du monde rural n'est pas anodin. Chaque année, le contexte économique, réglementaire et social est un peu plus dur pour les éleveurs. Chaque année, leurs conditions de vie et de travail sont un peu plus difficiles, pour ne pas dire révoltantes. Bien sûr, il y en a toujours pour vous dire qu'on vit bien au pays basque, qu'on ne peut pas se plaindre, que ça pourrait aller plus mal. Et c'est vrai: ça pourrait aller plus mal. D'ailleurs ça ira plus mal, sûrement. L'an prochain? Dans deux ans? Le modèle agricole en général et le modèle d'élevage en particulier, est de plus en plus in: -dustriel, -tensif, -tégré, -humain! La ferme qui comptait 100 ou 120 brebis à la fin des années 90 en compte 350 ou 400 aujourd'hui. La ferme qui avait quelques lapins, des poules et des cochons, n'en a souvent plus: c'est un truc de vieux, de nostalgiques. J'exagère un peu quand même, le cochon a encore de beaux jours devant lui...
comme dit un charcutier de Laruns: "ne faites pas aux truies ce que vous aimeriez confit"
Avec ou sans basse-cour, il y en a qui sont tombés dans le piège de la production à tout prix, qui ont abandonné les brebis de race locale (Manech), rustiques et bien adaptées à la montagne, pour s'équiper en Lacaune: une usine à lait qui supporte mal l'extérieur et a besoin d'engloutir des quantités énormes pour produire correctement. Une première conséquence de tout ça, c'est que si on met plus de bêtes sur les mêmes surfaces agricoles, il devient difficile de les nourrir avec ce que produit chaque exploitation. Surtout en zone de moyenne montagne. L'univers est peut-être en expansion, mais les hectares ne se multiplient pas! Les zones de pacage et de parcours des bêtes sont limitées, les possibilités de produire du foin, de la paille et de l'ensilage le sont aussi. Les terres s'arrachent comme des petits pains. Les prix s'envolent: pour le foncier et pour le l'alimentation. Seuls les petits élevages s'en tirent à peu près, qui paillent avec de la fougère et dont les brebis rustiques peuvent sortir presque toute l'année et brouter ce qu'elles trouvent. L'alternative c'est d'acheter, de faire venir la paille, le foin, la luzerne, le grain, par camions entiers depuis le centre de la France voire l'Espagne, Navarra y Castilla. Le coût est élevé et soumis aux fluctuations d'un marché sur lequel les éleveurs n'ont aucun contrôle. Une deuxième conséquence, c'est évidemment que la pression infectieuse est énorme, car assez logiquement proportionnelle à la densité d'animaux. D'où une augmentation progressive des problèmes, des maladies, des traitements donc de la résistance aux traitements, et le cercle vicieux de l'intensif. Tout coûtant plus cher (sauf la production), les marges diminuent et le "seul moyen" de maintenir les revenus est d'augmenter la taille des cheptels.

Depuis les années 60 et la Révolution verte, on fait la promotion de la monoculture et de la spécialisation des agriculteurs. On vend le modèle de filières intégrées, d'exploitants agricoles chefs d'entreprises, de fermes modernes dans lesquelles il n'y a de place ni pour un couple de cochons, ni pour un potager, ni pour quelques poules. Il y a même des vétérinaires et des experts en épidémiologie pour aller dire que les cochons et les poules sont des incubateurs à Influenza virus et autres, qu'il est préférable de les écarter des ateliers d'élevage. Perte de la polyvalence et de l'auto-suffisance des paysans d'un côté, intensification de la production, intégration des filières, de la distribution, de la transformation de l'autre: l'agriculture est prise au piège d'un système qui lui a pris sa souveraineté et l'a aliénée. Comment un éleveur nourrit-il 600 brebis en moyenne montagne sans acheter des céréales? Comment un producteur écoule-t-il 10.000 tonnes de céréales sans un marché international qui spécule sur les cours de récoltes que l'on a pas encore semées? Comment ce même éleveur vend-il 500 agneaux de lait sevrés la même semaine sans les négociants en viande, la grande distribution et un marché international globalisé? Et en bout de chaîne, que faire de tous ces milliers de litres de lait (le tank est plein tous les deux jours), sans le camion de la laiterie, propriété des multinationales de l'agro-alimentaire qui fixent les prix et les règles du jeu? On a fabriqué des monstres qui aujourd'hui, font peur à leurs géniteurs. On peut aller un peu plus loin: pour des raisons "structurelles", l'agneau produit en Iparralde est acheté aux producteurs environ 2,50 euros du kilo, 2,30 les mauvais jours, 3 euros juste avant Noël. À prendre ou à laisser. Les négociants le revendront à des intermédiaires qui le revendront aux supermarchés et aux détaillants, qui le vendront à leur tour au client entre 16 et 25 euros le kilo. Autrement dit, la marge va aux intermédiaires et si le produit final est "cher", ce n'est pas faute d'essorer scrupuleusement les éleveurs... La chose se complique quand le petit supermarché de SJPP, qui joue la carte local à fond, avec des drapeaux basques dans tous les coins, propose  dans ses gondoles un mois avant Pâques (et à grand renfort de publicité), du gigot d'agneau de Nouvelle-Zélande à 11 euros le kilo. Donc la région est saturée d'agneau de lait du pays, qu'on peine à écouler et qui se vend en Espagne ou en Italie, les éleveurs ne gagnent pas d'argent en le vendant parce que "la filière" les lui achète une misère, l'agneau local finit par être vendu cher au consommateur, tandis qu'on lui offre pour presque la moitié du prix un agneau produit aux antipodes, qui a navigué 20.000km en cargo dans des containers réfrigérés... Je suis sûr qu'un économiste pourrait m'expliquer pourquoi c'est mieux comme ça et pourquoi un marché globalisé est non seulement meilleur, mais aussi plus juste. Moi, ça me donne juste envie de sortir dans la rue et de cogner sur des gens. Pour qu'ils se rendent compte. Pour leur bien.

ce petit coin de nature est l'endroit idéal pour... un râlage.
Le plus désespérant, c'est que chaque année (et chaque gouvernement) apporte sa nouvelle loi d'orientation, visant, je cite à "professionnaliser la filière", "améliorer les rendements", "maximiser les profits par une meilleure efficacité"... On connait le refrain. Ce printemps, on vous propose la PAC 2014/2020 sous-titre: "comment assurer une redistribution en faveur de l'élevage et de l'emploi". L'objectif est simple, il s'agit de "favoriser la structuration de la filière bovine", autrement dit, de réformer les primes bovines pour récompenser les bons éleveurs. C'est formidable ça, récompenser les bons éleveurs. La question bien sûr, est: qu'est ce qu'un bon éleveur? Or la réponse est troublante: un bon éleveur c'est d'abord un éleveur qui a plus de vaches. Toujours plus. Au moins dix vaches adultes. Le papi paysan et l'éleveur de brebis qui gardent trois vaches (ou huit) dans une vieille étable et leur donnent le foin récolté sur place, ils ne sont pas bons. Leur activité ne mérite pas un soutien de la PAC, parce qu'elle ne joue pas un rôle écologique, social et économique important. On va plutôt donner la prime à celui qui a beaucoup de vaches. Donc qui ne produit pas l'aliment ni la litière lui-même, qui doit l'acheter et la faire venir en camion. Mais aussi et surtout, à celui qui devra "gérer" des tonnes de mer... pardon, d'effluents. Beaucoup plus que ce que ses terres lui permettront d'épandre. Tonnes d'effluents qu'il devra manipuler avec des tracteurs, des pelleteuses, des remorques et des machines qui roulent au diesel. Tonnes d'effluents totalement disproportionnées par rapport aux hectares dont il dispose pour que le sol et les plantes les réutilisent. Parce qu'au bout du compte, la nature est ainsi faite qu'une vache qui broute sur un hectare de prairie, sans l'épuiser et sans mourir de faim, chie une quantité de bouse qui fertilise la prairie sans l'empoisonner ni sans l'appauvrir. Il est troublant de constater que cet équilibre subtil ne repose sur la science d'aucun agronome, d'aucun vétérinaire, d'aucun économiste bruxellois.

Mais ce serait trop facile: plus de vaches pour plus de sous. L'équation a un petit goût de déjà vu. Travailler plus pour gagner plus. Pour une réforme de la PAC présentée par la Gauche, ça ferait presque grincer des dents. Heureusement, ça ne s'arrête pas là: il faut non seulement avoir plus de vaches (au moins dix adultes, donc une douzaine ou une quinzaine en tout, en comptant les génisses et les jeunes bovins, ce qui signifie un bâtiment dédié, plus de moyens pour leur distribuer la nourriture, pour les pailler, pour sortir la mer... etc.) mais il faut aussi qu'elles aient une "bonne" prolificité. Qu'est ce que ça veut dire? Tout simplement qu'il faut s'assurer qu'elles feront au moins 0,8 veau par an. On croirait le discours d'un commercial. Si la vache ne fait pas péter son objectif veau pour la saison et que sa prolificité tombe au-dessous du seuil établi par sa hiérarchie, adieu le bonus! De quoi motiver notre "bon" éleveur à optimiser la reproduction de ses vaches: échographies, diagnostic de gestation, traitement hormonal, insémination, alimentation poussée... Pas le temps de les sortir au pré, pas le temps de monter en estive, pas le temps de détecter les chaleurs en les observant ou en mettant un taureau. De toutes façons, avec plus de vaches, on a moins de temps pour s'en occuper, c'est mathémagique. Le "bon" éleveur est pressé: il doit atteindre son objectif. Du coup, il rationalise, il professionnalise, il optimise et il... pousse. Tout ça, évidemment, lui coûte beaucoup plus cher que de simplement élever des vaches, comme au bon vieux temps. Mais ça se justifie, puisqu'il fera des économies d'échelle et recevra des subventions. Le bon éleveur, c'est donc un éleveur, pardon, un "chef d'entreprise du secteur agricole", qui produit au-delà de sa capacité, au-delà du rendement naturel des bêtes, qui dépend en amont et en aval de "la filière" et qui est à la merci des vendeurs d'aliment, des vendeurs de pétrole, des vendeurs de machines et de la spéculation. Alors effectivement, perdu dans ce cycle de dépendances, il produit à perte. Nourrir ses vaches avec tous ses tracteurs et tous ses camions pleins d'aliment et toutes ses fosses pleines de merde, ça coûte plus cher que ce que lui rapporteront les veaux, si on veut bien les lui acheter.. Mais surtout, ça fait les choux gras de son banquier qui lui a fait un prêt pour chaque machine et chaque bâtiment et qui vit confortablement de la rente des intérêts. Eux-mêmes payés grâce à la subvention européenne reçue par l'éleveur pour le récompenser d'être un "bon" éleveur. Un vaillant fantassin de la Révolution verte. Un homme et ses machines pour exploiter 200 hectares ou 200 têtes de bétail. Un homme par village. Un homme qui ne possède ni la terre, ni le capital, ni les bêtes, ni les machines. Un homme qui est aussi pauvre qu'un banquier ou un politicien, qui ne possèdent ni l'argent qu'ils nous prêtent ni les discours qu'il nous servent. Un homme, surtout, qui prend sa voiture et fait 50km tous les soirs après le travail pour rentrer chez lui, parce qu'il est seul sur ses 200 hectares et avec ses 200 têtes de bétail. Parce qu'il n'a plus de voisins. Parce qu'il n'y a plus de village. Parce que le village a besoin pour exister de 20 familles de paysans pour justifier son école municipale, son bureau de Poste, sa boulangerie et son café. Parce que 20 familles de paysans ne peuvent faire vivre 200 hectares et 200 têtes de bétail qu'à condition de se les partager: de faire paître chacune 10 vaches sur 10 hectares. Et d'avoir chacune des prairies et des céréales, et un potager, deux cochons, des lapins et des poules. Ces 20 familles, non seulement vivraient de la terre mais pourraient aussi nourrir ceux qui au village seraient par exemple: boulangère, maître d'école, postière, infirmier ou épicier. Dans ce modèle, on pourrait même se payer le luxe d'avoir un vétérinaire quatre ou cinq villages, au lieu d'un contrôleur sanitaire connecté aux 200 vaches par internet depuis un bureau. Un technicien de la Chambre d'agriculture de l'Ariège nous le disait l'autre jour: "le modèle aujourd'hui pour un céréalier en Ariège (en Ariège, pas dans la Beauce!!!), c'est trois ou quatre cents hectares achetés par un gars qui a du pognon à investir, travaillés par un salarié sur un tracteur (à 300.000 euros). Et le salarié, avec ses trois ou quatre cents hectares et son tracteur (à 300.00 euros), il tire un smic à la fin du mois, pas un centime de plus. La question n'est pas de savoir si je suis d'accord ou pas avec ce modèle. La question c'est qu'aujourd'hui, le modèle c'est ça. Point."

Mais ce qui me met le plus en colère dans tout ça, c'est encore le cynisme des politiques et des décideurs, qui vont prendre leur bain de foule et serrer des mains chaque hiver au Salon. Parce que les politiques et les décideurs, qui ont consacré les 40 dernières années à tuer les paysans et à fabriquer des entrepreneurs avec leur Révolution verte, leurs rendements et leurs OGM, ce sont les mêmes qui décrètent la bouche en coeur que 2014 sera l'Année Internationale de l'Agriculture Familiale:


Et ce n'est pas une blague, puisque c'est la FAO (donc l'ONU) qui le clame haut et fort en plein de langues. Quelle hypocrisie! À tous les pays "du Sud" (nouvel euphémisme à la monde) dont on a détruit le sol, la forêt primaire, la culture et le système sociétal pour en exploiter les ressources et y imposer des mono-cultures destinées à l'exportation, à tous ces pays donc, on propose avec un sourire paternaliste notre aide au développement centrée sur l'agriculture familiale. Un enfant africain et son zébu! Démagogie dégueulasse. Aux éleveurs français, on propose d'augmenter encore le rendement de leurs exploitations en y mettant plus de vaches sur moins d'hectares. On les incite à planter du maïs transgénique pour en faire du bio-éthanol, au lieu de nourrir leurs bêtes et leur communauté. Et on leur agite sous le nez l'Année Internationale de l'Agriculture Familiale.

S'il y avait un impôt sur le cynisme, je vous dis que la dette publique...

Tuesday, March 18, 2014

back au pays basque! (chapitre troisième)


"Arriben les grues, és hora d'emprendre el vol!"
a déclaré Wallis en se brossant les dents.


Après sept semaines de bons et loyaux services dans le froid, le vent et la pluie, le dieu basque du climat a voulu nous faire un petit cadeau pour notre départ en pré-retraite: le soleil a fait son apparition pour nos dix derniers jours ici, on a pris quinze degrés en trois jours et les paysans sont sortis tout à la fois de leur hibernation morose et... de leurs gonds!


"O gué, o gué, le pays basque est déchaîné,
O gué, o gué, les beaux jours sont arrivés!"


Bon, on ne voudrait pas avoir l'air de se plaindre non plus : c'est quand même bien agréable de faire la tournée en manches courtes, de casser la croûte au soleil en plissant les yeux et d'arriver pour trouver, ici et là, les brebis dehors parce que "je pensais que vous arriveriez plus tard" ou "plus tôt", ou encore "On m'avait dit demain", voire "Ashtapitoi! J'avais complètement oublié".  Bref. C'est vrai, c'est arrivé d'un coup. Un dimanche gris mais pas trop froid, mais gris quand même, mais supportable, on était montés au parc derrière la citadelle tendre la slackline entre deux gros arbres et essayer de dégourdir un peu nos corps, euh bin, engourdis par l'hiver quand soudain on a entendu quelque chose comme ça:

(merci à Martin Miethke pour cet extrait (XC71065, voir la page) - licence Creative Commons)

En levant les nez, on a vu une formation en triangle loin, très loin là-haut ; bientôt suivie d'une autre et d'une autre encore. Les grues (grus grus) étaient de retour d'Afrique, annonçant à qui voulait l'entendre la fin de l'hiver. Leur passage est un spectacle magique: immenses V mouvants qui glissent sur le ciel, se forment, se déforment et se reforment, se branchent, se débranchent et se rebranchent dans un mouvement continu. Pardon pour le cliché, on dirait un ballet. Tout y est gracieux et aérien: les tutus et les collants rose pastel, les ballerines à pointes en bois, les petits rats... Mais surtout, ça fait un boucan infernal et si ce n'est pas exactement harmonieux, c'est en tout cas très doux à l'oreille pour le baume printanier que ça met au cœur. Enfin, on se comprend... Ce qui en revanche fait un peu plus mal, c'est la gueule de bois du lendemain. Le retour à la réalité terre à terre. On se réveille avec encore le goût du vol des grues sur le ciel, on petit-déjeune, on s'habille, on se brosse les dents, on sort à l'air libre et on se prend la fin de la trêve hivernale en pleine poire. Il y a du smog qui pique les yeux, on ne voit ni les montagnes, ni le soleil. À des kilomètres à la ronde, ça sent le barbecue, le feu de bois et - excusez mon langage - la merde. Explication: l'hiver à défaut d'être froid, fut humide. Pas de gelées, mais de l'eau, rien que de l'eau, de l'eau de pluie, de l'eau de là-haut (sic). Or, d'un côté, il y a la tradition de l'écobuage (dont on a déjà parlé) qui se pratique en février-mars. Les jours ensoleillés mais sans vent, on crame allègrement la broussaille, la fougère et le thuya, toutes les parcelles non pacagées et non entretenues.Ça nettoie bien, seule la petite végétation sèche et morte brûle, ainsi que quelques poteaux de téléphone et un randonneur de temps en temps, mais les arbres et arbustes sains résistent, eux. Enfin, il y a des accidents régulièrement mais c'est important pour l'écologie prairiale (allez dire ça aux lombrics et aux campagnols!) et ça fertilise… Bon, glissons.


l'écobuage, une tradition pastorale...
Avec cet hiver pourri et ces deux mois de pluie continue (quand il s'arrêtait de pleuvoir, il ventait à décorner les bœufs, les boucs et j'en passe - Brassens n'aurait pas laissé passer si belle occasion de moquer un cocu), l'envie d'écobuer était là et bien là. En Iparralde, chacun rongeait son frein et astiquait son amadou. D'autre part, pour les mêmes raisons de météo peu clémente, tempérée mais humide, les bêtes - avec ou sans cornes - restaient en leurs pénates. Impossible de les sortir des bergeries et étables sous et autour desquelles la litière sale et crottée s'accumulait dangereusement. Qui dit impossible de sortir les bêtes, dit impossible de rentrer le tracteur pour racler et sortir la mer... Les fosses étant prêtes à déborder, l'urgence se faisait sentir. Au lendemain du premier jour de soleil, vlan!
et la lumière fut (de retour)...
Les prés à peine secs (ou pas tout à fait encore, voir photo ci-contre), vas-y que je t'envoie les bêtes faire un tour dehors et prendre l'air. Vas-y que les tracteurs et leurs pompes à mer... se mettent à l'oeuvre. Et vas-y que je t’épand tout ça dans les champs pour fertiliser un bon coup. CQFD: fumée épaisse façon banlieue industrielle de Beijing, odeur de feu de bois, de barbecue et de mer... Comme aurait dit mon arrière-grand-père dans ce roman rural pseudo-autobiographique que je n'ai jamais écrit: "écobuage et épandage sont les mamelles du printemps". On a remis ci-dessus deux nouvelles photos pour illustrer le thème écobuage (d'autres ici) mais on ne s'appesantira pas sur l'épandage: ça n'est pas très visuel. Faut s'approcher, Coco. Faut l'sentir, faut l'vivre, quoi, s'tu veux... Voilà.

En résumé et pour finir en beauté: on a profité du (prin)temps, on a savouré les dernières journées de travail, on a pris des photos des prés verts et des bêtes heureuses de retrouver le soleil, puis un beau jour (un vendredi) on a dit au revoir à tout le monde à la clinique et on a chargé la voiture. Fin de l'épisode Iparralde (pour cette année, du moins). On part pour de nouvelles aventures, pleins d'envie et d'énergie. Prochaine étape l'Ariège pour du wwoofing et du helpxing, un stage de tonte de brebis et d'autres aventures qui commencent à prendre forme... Ne perdez pas le fil, restez connectés!

Monday, March 3, 2014

crónicas del otro lado (episodio 2)


o "Koala en Cantabria, hambre no pasará!"

Con 24 horas de retraso, con un temporal de nieve, con unos kilitos mas alrededor de la cintura y con una piedra en el corazón, dejamos Burgos atrás. Pasamos 4 días en casa de Willy, donde caímos víctimas de su superlativo sentido de la hospitalidad y de sus dones para la cocina... Dios! Qué manera de comer exquisiteses y beber néctares sin parar, de la salida a la puesta del sol,y entre medio también. Burgos! Su catedral, su zona azul, su frío seco, su gente. Dejamos Burgos atrás, pues nos esperaba la brava, misteriosa y encantada costa de Cantabria. Allí, habíamos quedado con J. y su familia para pasar un par de días mientras le entregábamos unos trabajos encargados tres semanas antes. Se dieron las casualidades (en 2014, las casualidades son como los unicornios: no hay quien todavía se atreva a creer en su existencia) de que él nos pidió traducciones para las fechas de nuestra visita por Castilla y de que él vive justamente en la costa cantábrica, en la frontera con Asturias, a menos de 200km al norte de Burgos. En fin, long story made short, le propusimos a J. entregarle las traducciones en mano y le pedimos hospitalidad para un par de noches. Un(t)raveling, o el arte de quedarse a dormir en casas ajenas... No nos hacía falta más para desviarnos un poco en el camino de vuelta e ir a descubrir - después del hogar de la morcilla - las tierras de habada... Así que salimos de Burgos sin incidentes, a parte quizás, de una emboscada jurásica en una rotonda de la N-627. Pasamos de largo la famosa escuela de escalada de Peñahorada, sin una mirada ni nada: deberes hechos, cuestión del escalar en invierno resuelta, todo bien (mentira podrida!). Contemplamos la llanura cubierta de nieve, la llanura y sus muros de piedra, la llanura y sus trigales desolados, la llanura uniforme y gris, la llanuraaaaaa... Paramos algunas veces en el camino, a cazar imágenes. No conseguimos ni una. Paramos en un restaurante de carretera de aquellos bien horteras, a probar suerte. Un restaurante de aquellos que venden postales originales de los años 70, con manchas de sol incluidas y cintas de audio de El Fari. Pero un restaurante de aquellos que te hacen bocadillos de lomo y queso del Otro Mundo. Burbujas del paraíso abandonadas allí para la conversión de las masas

bocadillos de lomo y queso, Cantabria y las puertas del paraíso.
Nos desviamos antes de Torrelavega con rumbo al minúsculo pueblo de P., escondido frente al mar entre unas colinas cubiertas de bosques de eucaliptos y la doble desembocadura de los ríos D. y N., aún más cortitos en su recorrido entre Picos de Europa y el Golfo de Bizcaia que nuestra querida Nive. El pueblito de P. es muy agradable y tranquilo, condenado por su situación geográfica (qué suerte!) a no crecer más de la cuenta, a pesar de tres o cuatro bloques de pisos de obra nueva que parecen vacíos y hasta sin estrenar. Nos dice J. que el progreso ha llegado hasta aquí: que la prospección inmobiliaria es una plaga, que los turistas han reemplazado los rebaños (me pregunto si deben pastar también estos prados con vistas al mar) y que sí, se nota la crisis en P. Se nota, nos explica, por los huertos que brotan - literalmente - en todos los jardines del pueblo y por el retorno de algunas familias locales a la recogida de un alga llamado Ocle, cuyo alto contenido en galactopiranosa lo destina a la producción de agar-agar y carraginatos para las industrias farmacéutica (agarosa para microbiología) y agro-alimentaria (el gelifiante E406 y el estabilizante E407), entre otros. Usos tradicionales del Ocle aprovechaban su reactividad con las proteínas de la leche para cuajarla y hacer queso. Lo primero que se me ocurre decir, aunque suene desesperadamente poco original, es que la zona es preciosa, inspiradora, grandiosa, con unos contrastes impresionantes entre verdes prados, caliza negra, cielos grises y mar color de plomo. Con la espuma del Atlántico en los pies, el sabor a sal y algas en la boca, y el olor a vacas y caballos en la nariz, uno puede tener la mirada en las cimas nevadas de Picos de Europa. Una experiencia sensorialmente saturadora pero de lo más satisfactoria:

espuma de mar, caca de vaca, barca de pesca y picos de Europa...
Pronto paramos a contemplar la desembocadura del río D. espectacular con sus barquitas y sus caballos en la luz de la mañana, seguimos la carreterita costera, parando por aquí por allí en búsqueda de tesoros escondidos, pueblecillos remotos, o crías de koalas entre los eucaliptos. Se nos hizo raro al cabo de un rato, el ver tantos eucaliptos por todas partes. Ya descubrimos hará un par de años ahora la invasión silenciosa de Extremadura, Portugal y parte de Andalucía por estas especies australianas, de rápido crecimiento y alto rendimiento para la industria papelera. A parte de eso, sus órganos de reserva subterráneos y su gran adaptación a un amplio abanico climático lo hacen muy invasivo (a expensas de especies autóctonas), su hojarasca, si no es directamente tóxica para las plantas que crecen alrededor, modifica las propriedades físicas y químicas del suelo, su madera es de pésima calidad para trabajar o quemar y su efecto tanto en el paisaje como sobre la biodiversidad de los ecosistemas europeos es terrible. Wikipedia nos dice que "un bosque de eucaliptos de 15 unos años contiene menos de la mitad de especies vegetales distintas que uno de encinas o de castaños de la misma edad"... No obstante, en varias zonas de África donde se plantó para sus propiedades como repelente de insectos, el eucalipto tuvo un impacto muy positivo en zonas de malaria endémica, al secar en unos pocos años las marismas donde se reproducían los mosquitos... Eso para intentar cerrar el párrafo eucalipto con una nota positiva! Pero la verdad es que los hay por todas partes, desde Aguilar del Campoo hasta la linea de costa, y desde los prados de picos de Europa, cerca de mil metros de altura, hasta los parques de Donostia, con los pies en la playa. Si bien el árbol en sí no es feo, su omnipresencia como la uniformidad de sus oscuros y densos bosques acaba dando algo de mal rollo, como cuando te quieres bañar en verano y el mar esta lleno de medusas.

modernismo y decadencia en Llanes...
En fin... Caminando entre vacas y acantilados, descubrimos los excéntricos inventos de la oscura roca caliza costera: las numerosas grietas y cuevas formadas por la erosión y el ataque de las olas, terminan creando unos fenómenos naturales espectaculares. A una distancia respectable de los acantilados y del furor de las olas, uno encuentra al azar unas pacificas playas interiores escondidas detrás de los acantilados, con arena fina y oleada suave. Luego se cruza inesperadamente con los bufones, unas chimeneas que suben del nivel del mar y donde el aire comprimido por la olas y cargado de sal sale disparado con un ruido parecido al de un avión despegando... Dicen que en los días de mucha mar, los bufones no escupen sólo aire sino también agua, convirtiéndose en geysers al estilo islándico. Bordeamos la costa asturiana hasta Llanes, pequeña ciudad donde las casitas de pescadores restauradas alternan con torres modernistas abandonadas y a punto de caer(se). Compramos pan, tomates y queso de Cabrales, y dejamos la costa para adentrarnos en el Parque Natural de Picos de Europa, cuyas cumbres nos llamaban a gritos desde el día anterior... En tan sólo 40 minutos de coche, uno cambia de mundo, de ambiente, de chip. Uno pasa sin apenas transición - del mejillón al conejo (perdón, del mar a la montaña). Y aquí, es donde me quedo corto. No tengo palabras. Usando las de otro: me gusta la montaña, me gustas tú. Me encantan las rocas, las paredes, las cimas, los picos, los ríos y las cabañas de pastor. Me flipa y me hace feliz patear e incluso trepar por allí arriba. Pero eso... Hay algo en Picos de Europa que no hay en otros lugares. Algo pasa con el aire, o con la luz, o con la presión atmosférica. O había mescalina en el queso de Cabrales o yo qué sé? Es espectacular. Es sublime. Es espectacublime.

el Naranjo de Bulnes, el naranjo de Bulnes, el naranjo de Bulnes, el naranjo de Bul...
Estuvimos un rato por allí arriba, en una aldea de 3 casas cuyo nombre no recuerdo, esperando un espacio entre las nubes para saludar al Naranjo de Bulnes, que al final nos obsequió una breve aparición. Salieron el sol, el arco iris, la niebla y la lluvia otra vez, luego se volvió a tapar todo y la tarde se dio por acabada sin siquiera avisarnos. Volvimos a P. para cenar con J., su mujer y su hijo A. Charlamos un rato y a la mañana siguiente, acompañamos a P. a su escuela para explicarles a sus alumnos nuestro trabajo de veterinarios sanitariorurales en Iparralde. Momento divertido de pujas infantiles cuando mencionamos que trabajábamos con ovejas y vacas: se levantó una manita: "-sí? -mi papá tiene 2 vacas. -Ah, muy bien". Pronto se levantó otra manita "-Pues mis abuelos tienen 5 vacas y un burro. -Fantástico!". De repente se levantó otra manita "Pues en mi casa, hay 11 vacas, y conejos, y cabras y 3 gatos. Vaya!". Silencio respetuoso hasta que se levantó otra manita "Pues mi papá tiene 3000 vacas!". Toma! Fin de las pujas, sonrisas entendidas del maestro y de los veterinarios. Nada más salir de la escuela volvimos corriendo hacia los Picos, a caminar un poco al sol, a tocar nieve, a respirar aire fresco y a terminar el pan y el Cabrales antes de emprender el camino de vuelta. El queso de Cabrales, no lo quieres dejar en tu coche demasiado rato, es mejor comérselo rápido...
cabañas pastorales de verano por las montañas de Sotres: nos arreglábamos una y nos quedábamos!
Volvimos por la costa buscando unas carreteras pequeñitas, nos perdimos un poco pasado Guernica, con la luz de la reserva de gasolina encendida y disfrutamos la puesta del sol en el océano con un festival de rosas y lilas. Anunciaban otro temporal en todo el Golfo, así que nos dimos un poco de prisa y llegamos cansados a la clínica para esperar a M., G. y la pequeña Lele para otro fin de semana de comer, beber y charlar. Hubo ganas e intentos de salir a pasear pero la lluvia, la nieve y el viento se encargaron de mandarnos de vuelta al lado del hogar, sino con Armagnac, pues con Patxaran. Osasuna!